Milarépa

Milarépa

Abandon et Réalisation
tib. Pang Toks

Milarépa est un cas typique du “syndrome de pénitent”. La prise de conscience de ses actes négatifs et de leurs conséquences karmiques, l’amèneront à rechercher un Lama pour recevoir les instructions qui le libèreront d’une renaissance infernale. En se considérant comme “un grand fauteur”, il ne lui sera pas possible de comprendre le Dzok Tchèn, la Grande Perfection, que lui transmit son premier Lama. C’est encore “son démon” qui fera que Milarépa n’interceptera pas ce que Marpa lui dit : « si tu te prétends un grand fauteur, ne t’en accuse pas devant moi ». C’est encore “son démon” qui l'empêchera de comprendre ce que fait Marpa, puis le conduira finalement à briser le lien vajra au Lama Racine.

Le syndrome du pénitent est un démon qui entraîne à l'esprit une telle distorsion dans la perception et le jugement de nos actes négatifs qu'on ne trouvera pas de punition ou de sentence assez forte pour se permettre de se purifier, de s'absoudre ou de se pardonner. Ce démon trouve son apogée quand Milarépa estime le suicide comme la seule sanction qu’il mérite. Marpa compris que sa thérapie ne pouvait aboutir. Alors que Milarépa n’avait plus qu’un seul mois d’épreuve à passer auprès de Marpa, il lui faudra partir pour onze années de retraite en montagne. Le challenge du pénitent et l’héroïsme spirituel sont corrélatif à ce type de démon mais çà prend plus de temps.

À l’instar de Sakyamouni, Milarépa en vient à abandonner (tib. Pang) son extrèmisme ascétique.  Dans le contexte vajra c'est par l’absorption de l’alcool et de la viande, offert par sa sœur, que Milarépa expérimente une première félicité. Dans sa grotte, quand ses démons finissent par lui apparaître en pleine conscience, Milarépa essaie de les chasser par des rituels de conjuration, puis il essaie de les amadouer par des rituels propitiatoires, puis essaie une compassion condescendante, puis il pense trouver secours dans sa dévotion à son “papa” Lama. Les démons ne sont pas sensibles à ces magouilles, tout au contraire, ils s’en nourrissent. Cela prendra du temps avant de comprendre que le comportement de Marpa ne faisait que transmettre la vue de la vacuité ; le seul devoir que se doit un Lama envers ses élèves. Non pas la vacuité à des fins spécifiques, non pas la vacuité pour évacuer des démons, mais la vacuité en l’imputation sur nos conceptions, nos perceptions et nos jugements. Ce sont les imputations qui font les démons. C’est alors que Milarépa obtient la réalisation (tib. Toks).

Lama Shérab,septembre 2019 lors d'une retraite de Tcheu